Gestion de l’eau : des prix bas qui noient le débat ?

Le Journal Toulousain du 22 novembre :

Ce jeudi 15 novembre, Jean-Luc Moudenc a annoncé avoir tranché en faveur d’une délégation de service public pour la gestion et l’assainissement de l’eau à Toulouse et dans l’agglomération.

« J’ai choisi la délégation de service public pour l’eau et pour l’assainissement parce que je considère que nous aurons un prix plus bas et une qualité meilleure. » Cette déclaration de Jean-Luc Moudenc, rendue publique dans “La Dépêche du Midi” à un mois des délibérations sur le sujet, a fait l’effet d’une bombe. Selon le président de Toulouse Métropole, le prix global annoncé de 2,95 euros par mètre cube le plus bas de France grâce à une double délégation de service public (DSP) partagée entre Veolia et Suez en fait un choix indiscutable. « Coup de bluff », « déni de démocratie », soupçons de « conflit d’intérêt », « opacité »…

L’opposition ne décolère pas. En effet, par cette annonce qui intervient deux jours seulement après la publication des résultats de l’appel d’offres, Jean-Luc Moudenc tranche la question, au moment où l’opposition pensait pouvoir mener, enfin, un débat éclairé. « Jusqu’à aujourd’hui, c’était trop tôt car nous n’avions pas les données objectives et, du jour au lendemain, on nous dit que c’est trop tard pour négocier », regrette François Lépineux, Maire de Brax et conseiller métropolitain.

Le principal grief de l’opposition porte sur le manque de transparence ayant entravé le débat. « La majorité fait clairement obstruction. Nous avions déjà dû saisir la Commission d’accès aux documents administratifs pour obtenir le cahier des charges. Aujourd’hui, on nous annonce des prix sans présenter les données détaillées, poste par poste. Nous sommes à trois semaines du vote et nous n’avons toujours pas accès au dossier complet », déplore l’élu du groupe Métropole Citoyenne. Il propose ainsi de reporter la délibération au mois de mars, ce qui permettrait, une fois les données complètes publiées, de les étudier et de formuler des contre-propositions.

« Les dés étaient pipés depuis le départ »

Selon Claude Raynal, président du groupe socialiste au conseil de la Métropole, le scénario de la régie a seulement servi de faire-valoir et de lièvre à la DSP. « Les dés étaient pipés depuis le départ. Les prix d’une mise en régie publique ont été annoncés publiquement. Par conséquent, il n’était pas compliqué pour Veolia ou Suez de s’aligner en-dessous pour emporter le marché », dénonce ce dernier, qui regrette que près d’un an et demi d’études se concluent par une décision prise en trois jours. De son côté, Antoine Maurice, élu de Métropole Citoyenne, alerte sur un possible conflit d’intérêt concernant le cabinet d’avocat Cabanes-Neveu, impliqué dans l’étude des réponses à l’appel d’offres de la DSP alors qu’il défend, par ailleurs, les intérêts de Veolia.

« Le cabinet mis en cause ne réalise que 0,7 % de son chiffre d’affaires avec Veolia et a déjà plaidé contre l’entreprise. Les études préliminaires et la rigueur du cahier des charges que nous avons présentés étaient, de l’aveu même de nos opposants, favorables à la régie car extrêmement contraignants pour les entreprises. C’est grâce à cette pression que nous avons obtenu le prix le plus bas de France », se défend Pierre Trautman, président de la commission d’appel d’offres. Face aux doutes qui subsistent sur l’artificialité des tarifs annoncés, l’élu assure que « les prix sont garantis sur 12 ans et encadrés par un panel d’indices alignés sur le cours de l’inflation ».

par Nicolas Belaubre

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