Marché de l’eau : une comparaison ‘faussée’ ?

La station de traitement des eaux de Pech-David à Toulouse. DDM – XAVIER DE FENOYL

La Dépêche du Midi dans son édition du 15 décembre 2020 rend compte du dernier rapport de la Chambre régionale des Comptes :

La chambre régionale des comptes va-t-elle rallumer la guerre entre les défenseurs de la gestion publique de l’eau et les adeptes de la délégation au privé ? Dans son rapport sur les comptes 2013-2019 de Toulouse Métropole, qui sera divulgué demain à l’occasion de l’assemblée des élus, les magistrats jettent un pavé dans la mare qui donnera des arguments aux tenants d’une gestion directe. Même si cet avis est sans effet sur la procédure qui a vu l’attribution des marchés de la Métropole fin 2018 à Véolia (pour l’eau) et à Suez (pour l’assainissement) ni sur sa légalité.

Rappelez-vous : Toulouse Métropole, pour choisir le mode de gestion le meilleur dans l’ensemble de ses 37 communes, avait lancé en 2017 une double comparaison. Des entreprises privées ont concouru entre elles. Et la gestion par la collectivité a été comparée à la gestion déléguée.

S’ils commencent par donner un bon point à la Métropole pour cette démarche qui permet de fusionner des pratiques très diverses, et « qui dépasse les obligations fixées par la réglementation », les magistrats touchent ensuite au point sensible. Ils estiment, écrivent-ils, que « la comparaison financière des offres a été faussée au profit de la délégation de service public ».

Leur principal argument concerne les hypothèses de recettes qui, dans le cas de la régie, « sont nettement plus limitées que dans les propositions des candidats délégataires, tant au niveau du nombre d’abonnés que de la progression de l’assiette de la redevance. » La régie aurait-elle pu être plus rentable ? C’est ce que les défenseurs de « l’eau publique », dont certains ont attaqué les délibérations en justice, ont toujours pensé.

Cette analyse, la Métropole, écrit-elle dans sa réponse à la chambre qui est annexée au rapport (1), la « réfute totalement ». Le débat n’est pas simple car il repose sur des considérations techniques. Certaines avaient déjà été opposées aux partisans de la gestion directe. D’abord, l’excédent brut d’exploitation (le bénéfice brut), avance la Métropole, ne peut « permettre de baisser le prix de l’eau » car « il doit servir à financer les investissements ». Le nombre de salariés dans l’hypothèse régie, ensuite, ne la pénaliserait pas non plus car « il est en adéquation avec les effectifs d’autres régies » comparables. Enfin, sur les hypothèses de recettes qui seraient sous-évaluées, la Métropole estime que les chiffres supérieurs avancés par le délégataire relèvent de « sa part de risque » qu’il assume seul.

En décembre 2018, la qualité des offres des entreprises avait été jugée meilleure avec un prix, pour l’eau, inférieur de 55 centimes à celui de la régie (2,91 € contre 3,46 € le m3). Avec un tel écart, le match public-privé avait été plié d’emblée. Il se poursuit en tribune.

(1) Contactée hier, la Métropole n’a pas souhaité s’exprimer en raison du caractère encore confidentiel du rapport.

Jean-Noël Gros, La Dépêche du Midi

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