Raréfaction de l’eau, quelle tarification pour quelle sobriété ?

Quelle tarification pour quelle sobriété ? La question mérite concertation!

Nous avons encore en mémoire les périodes d’extrême sécheresse dans notre région avec des restrictions de consommation d’eau potable dès la fin de l’hiver. Des questions de conflits d’usage se sont posées où chaque partie prenante a mis en avant ses arguments pour un traitement prioritaire sans pour autant faire avancer le débat de fond.

Le président de Toulouse Métropole a annoncé, comme réponse à la situation, la mise en place d’une tarification saisonnière de l’eau potable : moins chère l’hiver (30%), plus chère l’été (+42%). D’autres choix nous semblent plus intéressants tant d’un point de vue écologique que social.

Alors que nous lui avons adressé la lettre ouverte ci-dessous pour demander une large concertation sur ce sujet qui le mérite bien, nous apprenons la volonté de J.L. Moudenc, Président de Toulouse Métropole de soumettre la proposition au vote du prochain conseil le 4 avril pour une application le 1er juin 2024.

Pourquoi une telle précipitation ? A qui profite-t-elle ? La raison en est elle que cette méthode (commencer par les mois majorés) devrait provoquer une recette supplémentaire exceptionnelle pour l’année 2024 qui peut être estimée à 14 millions d’euros ?
Est ce encore la rentabilité qui doit guider l’action ? Nous réitérons notre demande de débat public. Les évolutions nécessaires n’auront pas lieu sans implication des citoyen.ne.s.

Toulouse le 29 février 2024

Objet : Demande de concertation sur le projet de modification des principes de tarification de l’eau

                                                                         Monsieur le Président,

Vous avez en décembre 2023 annoncé votre volonté de mettre en place une tarification saisonnière de l’eau sur le territoire de Toulouse Métropole pour permettre une « consommation plus responsable ».

Cette proposition ouvre des interrogations fortes et appelle un certain nombre de remarques.

La question de l’eau est aujourd’hui un enjeu majeur pour l’avenir, et ses usages comme sa « gestion » pour le bien commun exigent une grande responsabilité collective, et concernent immédiatement l’ensemble du corps social. L’accentuation des effets du changement climatique renforce cette importance.

Vous comprendrez donc que nous soyons très étonnés de la manière dont vous mettez en avant une proposition particulière pour un objectif spécifique qui mérite clarification, sans état des lieux partagé, ni définition de priorités, ni concertation avec les usagers.

Votre proposition est-elle la bonne ? Nous n’en sommes pas convaincus et pensons que d’autres modèles de tarifications seraient plus pertinents tant du point de vue écologique que social.

Pourquoi ne pas mettre sur la table toutes les questions qui sont soulevées et ouvrir une véritable concertation auprès des usagers sur le thème :
Quelle tarification pour quelle sobriété ?

En effet votre proposition soulève de nombreuses questions, toutes intéressantes au regard de l’objectif annoncé. Nombre d’entre elles n’ont pas trouvé de réponses au travers de votre communication.

Quelles sont actuellement les évolutions des consommations entre l’été et l’hiver ? Pour les particuliers ? Pour les entreprises, les collectivités, l’industrie ?
Malgré des sollicitations réitérées de notre association, aucune donnée, aucune analyse des consommations n’est communiquée jusqu’à présent entre ces différents types d’abonnés.

Quels objectifs sont-ils précisément poursuivis ?
Une baisse de la consommation globale ? Une baisse de la consommation l’été ? Une baisse de la consommation de tous, ou nous satisferons nous de la seule baisse des usagers qui n’auront pas les moyens de faire face à une tarification plus importante l’été ? Tous les consommateurs, individus, artisans, établissements de santé, administrations, industries peuvent ils / doivent ils avoir les mêmes objectifs de baisse de consommation ?

Vous n’avez ouvert aucune de ces réflexions nécessaires et n’y apportez aucune réponse.

D‘où partons nous ?

Un tarif plus cher est-il le meilleur moyen de réguler la consommation en été ? Des restrictions/interdictions sur certains usages ne sont elles pas plus efficaces et plus justes ?

Vous avez choisi de confier à des entreprises privées la gestion des services de l’eau et de l’assainissement dans le cadre de deux contrats de délégation de service public ; quelles seront les répercussions de votre proposition sur ces contrats ?

Jusqu’à présent votre communication n’aborde pas toutes ces questions.

Elle présente d’ailleurs la tarification saisonnière comme LA préconisation du Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) alors que celui-ci a formulé 9 préconisations pour que soient réunies les conditions d’une véritable tarification progressive.

Nous soutenons une proposition allant dans ce sens, s’appuyant sur les premiers m3 gratuits pour tous les particuliers, une tarification progressive au delà de ces premiers m3 et des tarifs différenciés selon les usages.
Nous ne méconnaissons pas les difficultés qui existent pour la mettre en œuvre dans les habitats collectifs sans compteurs individuels connus du distributeur, mais, comme le CESE, nous pensons que des étapes sont dès maintenant possibles pour atteindre cet objectif.

Vous le savez, nous ne pensons pas que l’eau soit une « marchandise » dont la distribution peut être régulée par les logiques de marché : « quand c’est rare c’est cher ». En effet l’eau est un élément vital dont tout être humain a besoin. Le premier changement de regard que notre société doit effectuer sur l’eau est d’en considérer les différents usages, les prioriser et les arbitrer

Cela nécessite aujourd’hui un exercice démocratique que nous vous proposons d’ouvrir à travers une première concertation sur les évolutions tarifaires, qui, nous le redisons, ne peuvent se résumer à « en été l’eau est plus rare donc plus chère ».

Nous sommes tout disposés à participer à une telle concertation.

Soyez assuré, Monsieur le Président, de notre intérêt pour une gestion responsable et écologique de l’eau.

Eau Secours 31

Le tract au format Pdf